WEBINAR. Densité de semis en maïs... Ça se pilote et ça peut même se moduler !

Jean-Louis Mary et Anthony Hardou, associés de l’ETA Coulon de Bouère (53), l'ont testé ces dernières années et approuvé : "La modulation intra-parcellaire, ça fonctionne". Les deux agriculteurs disposent de terres avec des potentiels très variables : ils ont donc décidé de faire varier les doses de semis en fonction du potentiel : selon le type de sol (sable, limon ou argile) mais aussi selon les contraintes climatiques de leur secteur (ressource limitée en eau). Ils se sont équipés il y a 10 ans en semoirs électriques adaptés pour la modulation des densités de semis au niveau intra-parcellaire et les résultats sont satisfaisants : "Je suis impressionné d'arriver à encore faire le rendement que l'on fait aujourd'hui avec aussi peu d'eau". 

Lors du webinar Culture Champs du 28 janvier dernier, vous avez pu découvrir en compagnie de Jean-Louis Mary et Anthony Hardou, associés de l’ETA Coulon de Bouère (53) les différents bénéfices que peuvent apporter la modulation des densités de semis au niveau intra-parcellaire.

Parmi les sujets abordés : 

• Comment trouver la densité idéale ?
• comment mesurer l'intérêt de la modulation intra-parcellaire ?
• Quel rendement espérer en maïs grain et maïs fourrage ?

Un moment d'échanges et de partages lors duquel nos experts ont également pris le temps de répondre à toutes vos questions.

A combien estimez-vous le coût/ha pour créer des cartes de préconisations ?

Réponse : Plusieurs techniques et méthodes sont possibles pour construire ces cartes de préconisations. Pour ces essais, nous les avons bâties nous-mêmes avec des logiciels de cartographie. Aujourd'hui, des solutions grand public comme Climate FieldView™ sont disponibles pour utiliser les informations disponibles sur la parcelle et bâtir une carte de préconisation. Ces services sont généralement facturés par abonnement annuel global pour votre exploitation, et ce peut importe le nombre de cartes créées.

Comment obtenir la première carte de sol et quel en est le coût ?

Réponse : Dans l'exemple proposé, nous avons réalisé une cartographie en utilisant les services d'un prestataire qui travaille par analyse de résistivité combinée à des analyses de laboratoire. Ces analyses physiques (valables à vie) et chimiques (valables quelques années) étaient facturées une centaine d'euros à l'hectare par le prestataire. En 2017, nous débutions dans la technique et avons voulu acquérir le plus de données possibles sur les parcelles testées. Aujourd'hui, nous considérons que ces cartographies sont très efficaces mais ne sont pas un passage obligé pour mettre en place de la modulation. D'autres approches (imagerie NDVI, photo historique parcellaire, carte historique de rendement) peuvent être utilisées afin de déterminer les niveaux de potentiel avec succès.

Avec un semoir électrique, puis-je moduler ma dose à l'intérieur de ma ligne de semis ?

Réponse : Les semoirs électriques modulent la dose de semis à l'intérieur de la ligne de semis, étant donné que chaque disque du semoir est alimenté par un moteur électrique indépendant. La console dans le tracteur vient piloter directement la dose apportée par chaque disque.

Le prix de la prestation de semis est-il plus élevé avec l'utilisation d'un semoir à modulation par rapport à celle d'un semoir classique ?

Réponse : La prestation de modulation de dose entre dans un pack semis amélioré avec coupure de tronçon, contrôle des doublons et de la pression au sol. Cette prestation de semis améliorée est facturée 20€ par hectare en supplément à l'agriculteur. Ce surcoût est remboursé par la qualité de la levée et la coupure de tronçon.

Dans le cas où je n’ai pas de semoir adapté pour être précis, comment faire ?

Réponse : Avec un semoir mécanique, vous pouvez déjà adapter votre densité de semis à la parcelle et à la variété. Vous avez un levier d'actions qui est important et intéressant financièrement à utiliser.

Quels sont les équipements nécessaires pour profiter de données chiffrées sur des modulations ?

Réponse : Avec un simple semoir mécanique, adaptez déjà votre densité de semis à votre parcelle et à votre variété. C'est un levier intéressant à mettre en place. Ensuite, si vous voulez mettre en place la modulation, vous avez besoin d'un semoir avec une distribution électrique, d'une console dans le tracteur capable de le piloter ainsi que d'une antenne GPS afin de se repérer dans la parcelle.

Est-ce que le type de sol est pris en compte ? (Sols sableux, argileux ...)

Réponse : Plusieurs techniques sont possibles pour déterminer les zones de potentiel dans la parcelle. En 2017, nous avons testé plusieurs méthodes, dont les mesures de résistivité couplées à des analyses laboratoire afin d'obtenir une cartographie de type de sol.

La fertilisation est-elle également modulée ?

Réponse : Dans ces essais, seule la quantité de semence a été modulée en fonction des zones de potentiel. Notre objectif était bien de séparer les facteurs afin de conclure sur la technique et nous avons cherché à nous placer en situation non limitante sur la fertilisation azotée et en adaptant la fertilisation phosphorique si le déficit était important. En revanche, il serait intéressant de combiner les techniques (modulation semence + modulation fertilisation) afin de voir si les bénéfices peuvent être cumulés.

Est-il possible d'avoir des informations sur le terroir des essais, taux de MO, RFU du sol, pluviométrie annuelle ?

Réponse : Nous avons conduit 92 essais en maïs grain et 29 essais en maïs fourrage sur 3 années. La diversité des situations rencontrées est telle que cela nous permet d'affirmer que la modulation intra-parcellaire est intéressante quel que soit le terroir. Nous avons vu des gains en bons potentiels comme en potentiels plus limités, en situations irriguées ou non.

Comment déterminer les zones de potentiel des parcelles, surtout en situation non-irriguées où le facteur hydrique n'est pas maitrisé ?

Réponse : Il est vrai que lorsqu'on est en situation non irriguée, le facteur réserve hydrique du sol est assez souvent le facteur limitant pour le rendement maïs. Cela peut s'analyser par analyse de sol ou méthode de résistivité. Mais attention, ce n'est pas toujours la réserve en eau qui est limitante. Pour ces essais, nous avons acquis des informations sur le sol, combinées à des historiques parcellaires et à l'expérience de l'agriculteur sur sa parcelle. Le croisement de ces informations nous a permis de déterminer les zones de potentiel.

Il est dit d'augmenter la densité en bon potentiel, qu'en est-il des densités les plus basses admissibles dans les zones à petit potentiel ? Par exemple, semer du DKC5830 à 52000 grains/ha en sec dans le Gers, potentiel autour de 70 qx/ha.

Réponse : Notre réseau d'essai en Europe caractérise les densités de semis optimales par variété, y compris à des densités de 50 000 graines par hectare ainsi que dans des côteaux à potentiel limité. Notre parcelle la plus proche se situe à Casteljaloux (47). Globalement, notre expérience sur les côteaux de votre secteur montre que ce terroir valorise en effet très bien la modulation de densité de semis avec de grosses différences de potentiels entre le bas et le haut des côteaux. En revanche, nous ne recommandons pas de descendre en-dessous de 50 000 graines par hectare. Certes, cela peut être rentable certaines années, mais dans ces conditions, il n'y a aucune marge de manoeuvre pour le maïs qui ne pourra pas compenser des éventuelles pertes de pieds. Au moindre aléa, la rentabilité de la culture sera mise à mal.

En perspectives, travaillez-vous dans vos essais sur un semis qui combine la modulation de dose et la possibilité de changer de variété en fonction des zones de potentiel de la parcelle ?

Réponse : C'est une technique que nous suivons et qui pourrait avoir de l'intérêt à l'avenir. Très peu de semoirs sont capables aujourd'hui de changer la variété en cours de semis. En densité de semis, tout le monde peut utiliser ce levier dès aujourd'hui chez lui.

On parle de semis classique à 80 cm, qu'en est il pour des semis à 39 cm ?

Réponse : Nous avons mis en place des essais depuis 2019 afin de chercher à comparer le comportement à la densité en écartements réduits. Globalement, nous avons vu que la réponse à la densité est modifiée lorsque l'on modifie l'écartement de semis et que la réponse semble dépendante à la variété. Nous poursuivons nos investigations sur ce sujet.

Comment choisir la variété qui s'adapte le mieux à la modulation ?

Réponse : La clé d'entrée pour le choix variétal doit rester aujourd'hui l'adaptation à son contexte pédo-climatique, y compris dans le cadre de la modulation. Il faut d'abord choisir une variété adaptée à sa parcelle puis regarder quelle est la densité de semis adaptée pour cette variété et cette parcelle. Vous pouvez vous rapprocher de votre distributeur qui saura vous conseiller une variété adaptée à vos besoins.

Comment respecter ces densités avec des pertes à la levée ?

Réponse : Nos recommandations sont des recommandations de densité de semis en conditions optimales. Vous connaissez vos parcelles et les conditions dans lesquelles vous semez. N'hésitez pas à adapter ces recommandations si vous anticipez des pertes à la levée (conditions froides ou humides, risque de ravageur...).

Est-ce possible de moduler lorsque je fais appel à un prestataire pour semer ?

Réponse : Rapprochez-vous de votre prestataire, une partie d'entre eux est déjà équipée. Pour les autres, ils renouvellent assez régulièrement leurs semoirs, remontez votre besoin.

Le gain de +6q concerne t'il uniquement les 79 % d'essais gagnants ou l'ensemble des essais ? Si non, quelle est la moyenne des 100 % d'essais ?

Réponse : Le gain concerne l'ensemble des essais. A retenir que cette technique a été largement testée. Voici les facteurs clés de succès : bien identifier les zones de potentiel dans les parcelles et bien associer la bonne densité adaptée à la variété choisie. Les essais où nous n'avons pas vu de gain proviennent majoritairement des premières années, alors que nous avions moins de recul et d'expérience avec la modulation.

A partir de quel niveau de variabilité de rendement dans la parcelle, la modulation de densité se justifie-t-elle ?

Réponse : Nous n'avons pas réussi à identifier un seuil clair de variabilité de rendement à partir duquel la modulation serait bénéfique. Il est clair que plus la parcelle est hétérogène, plus il sera bénéfique de faire de la modulation. Mais l'expérience de nos 3 années d'essais montre que l'hétérogénéité parcellaire est souvent sous-évaluée. L'enjeu n'est pas de trouver de l'hétérogénéité, mais plutôt de bien la mesurer pour bien prévoir les zones de potentiel.

Vous parlez uniquement de rendement. Pour le fourrage, qu'en est-il des valeurs alimentaires ?

Réponse : Nous avons mesuré sur nos essais le rendement et les valeurs alimentaires du maïs fourrage. L'impact de la modulation sur les valeurs alimentaires est dépendant de la variété. Certaines d'entre elles ont des valeurs alimentaires constantes quelle que soit la densité de semis appliquée. D'autres ont le rapport épi/plante qui évolue. Quoi qu'il en soit, la densité de semis est un paramètre important à contrôler en fonction du type de ration que vous utilisez dans votre élevage. Nos recommandations de densité prennent donc en compte cet aspect sur l'application en ligne www.dekalb.fr/appli3d . N'hésitez pas à vous rapprocher de votre distributeur pour plus de détails sur le sujet.