Le labour, levier agronomique très efficace en situation de forte infestation pour un désherbage durable
Pour désherber le ray-grass dans une parcelle qui n’a pas été labourée depuis 15 ans, le labour constitue l'une des solutions. Ce levier agronomique a été expérimenté sur la plateforme Herbinnov Sud-Ouest. Il est complété par un programme de désherbage chimique pour atteindre le 100 % d’efficacité et préserver le rendement. Par rapport au témoin non labouré, ce sont 30 quintaux de plus par hectare qui sont gagnés.
En finir avec une infestation de ray-grass, telle est la mission à accomplir sur la parcelle de désherbage Herbinnov Sud-Ouest localisée à Ondes (31), au nord de Toulouse. Quinze années de non-labour dans un sol très argileux (taux > 50%) ont amélioré la structure du sol, favorisant une bonne implantation des cultures. Si l’objectif de l’agriculteur a été atteint, avec un sol préservé, cette technique a atteint ses limites. Elle a conduit, au fil du temps, à une augmentation des populations de ray-grass.
Deux mesures agronomiques ont été choisies pour tenter de résoudre cette problématique de désherbage: un labour tous les quatre ans et le décalage de la date de semis, auxquelles s’ajoutent des itinéraires de désherbage chimique. « Dans nos essais, nous avons pu juger l’efficacité des différentes approches de désherbage sur le ray-grass en les comparant aux témoins », rappelle Dominique Papot, ingénieur conseil, cultures et environnement en charge de la plateforme. Ces témoins montrent un niveau d’infestation de 150 pieds de ray-grass par mètre carré.
Labour et décalage de la date de semis, quels sont les enseignements ?
La parcelle labourée se démarque avec moins de 3 pieds de ray-grass par mètre carré contre 150 pieds/m² dans la parcelle non labourée. Ainsi, le niveau d’infestation a été réduit de 98 %. Le labour apporte la première année un effet choc qui va perdurer pendanttrois à quatre années. Pour gagner en efficacité, d’autres leviers pourront être mis en place, agronomiques et chimiques.
Le décalage de la date de semis au 13 novembre 2018, pour chaque zone, labourée ou non, s’est révélé plus délicat à entreprendre. « L’effet sur le ray-grass est bien réel, puisque 40 % à 50 % des ray-grass ont été éliminés grâce à cette technique, sur une parcelle non labourée, témoigne Dominique Papot. L’association du labour et du décalage de la date détruit 98 % des ray-grass, en comparaison avec le témoin. Par contre, le blé a très mal levé. » Le sol très argileux de la parcelle ne s'est pas ressuyé après les fortes pluies, ce qui a gêné la levée. La conséquence a été une perte de pieds de blé de l’ordre de 30 % avec un impact significatif sur le rendement.
Dans le cas présent, le décalage était sans doute trop tardif. Dans des expériences passées, des décalages jusque fin octobre ont montré de très bons résultats pour réduire le niveau d'infestation, sans impact sur le potentiel de rendement.
« Le décalage de la date de semis reste une technique très intéressante pour désherber. Il doit être mis en place dans des sols adaptés, avec des variétés tardives. »
Programme double automne préconisé dans le cadre de la résistance aux ALS
Trois traitements herbicides ont été systématiquement mis en place pour chaque modalité agronomique : le premier avec une application en prélevée à base de Mateno®, puis le deuxième avec un passage au stade 3 feuilles de chlortoluron et le troisième raisonné en sortie d’hiver avec Atlantis® Pro. Dans le cadre d’une résistance du ray-grass aux ALS qui empêche un traitement en sortie d’hiver, le double d’automne Mateno® puis chlortoluron apporte 100 % d’efficacité. Par ailleurs, les résultats obtenus avec ce programme ne justifiaient pas un passage en sortie d’hiver sur graminées et dicotylédones.
L’itinéraire innovant : le désherbage se raisonne sur la rotation et non pas sur une culture
Trouver d’autres voies agronomiques pour gérer les adventices fait aussi partie des missions de la plateforme. Parmi celles-ci : le semis de maïs et de tournesol au strip-till réalisés sous couvert de phacélie et de féveroles. L’objectif premier de ces cultures intermédiaires est de fissurer et restructurer le sol en le préparant au futur semis. En parallèle, le couvert laissé sur la parcelle après roulage, freinera les levées de mauvaises herbes.
« L’expérience a bien fonctionné avec le maïs, au bémol près que nous n’avons pas pu semer pour des raisons techniques en combiné avec le passage du strip-till, ce qui a créé quelques décalages et retardé la levée de la culture, témoigne Dominique Papot. Par contre, pour le tournesol, là où les implantations ont été réussies, 2 feuilles de plus au stade 6 feuilles ont été remarquées dans l’itinéraire innovant par rapport à un semis traditionnel. Preuve que la technique permet une amélioration de la structure et favorise la bonne implantation de la culture. » Ces itinéraires vont être remis en place dans l’édition Herbinnov 2020.
Pour Dominique Papot, ingénieur conseil, cultures et environnement Bayer Sud-Ouest, « cette expérimentation menée depuis deux ans tend à prouver que la gestion agronomique du sol en cultures d’hiver est primordiale pour permettre un désherbage efficace. »